Gutes Ex., Einband berieben; leichte Gebrauchsspuren. - . Sous Louis XVI ce phenomene s'estompe : de nouvelles constructions voient le jour et les chantiers de bois reculent. Le caractere aristocratique et riche s'impose definitivement, qu'il s'agisse de la construction de l'hotel du prince de Salm ou de l'installation du jeune general de La Fayette, si en vue a son retour d'Amerique. Et Ton est frappe par l'insistance avec laquelle les memes noms se repetent: Choiseul, Montmorency, Talleyrand, du Roure, Bethune, Colbert et autres families dont plusieurs branches ont choisi cette rue et y demeurent plusieurs generations. Avec l'Empire la rue acquiert ses lettres de noblesse et devient veritablement une rue du " regime ", sorte de sanctuaire militaire : la Legion d'Honneur s'installe a l'hotel de Salm, les gardes imperiaux dans la ferme des voitures de la cour, sans oublier les hauts dignitaires de l'armee : Jourdan, Massena, Ney, Berthier, Lefevre, Mortier, Lobau, Mac Donald et surtout Eugene de Beauharnais, le beau-fils de l'Empereur. De grands projets administratifs voient egalement le jour et il est question d'edifier et d'etablir dans un meme edifice l'hotel du ministere de la Police et celui du ministere des Affaires etrangeres, a cote de la Legion d'Honneur, a un emplacement qui sera en definitive affecte a la Cour des Comptes. Rue des grands commis de l'Etat aussi, puisque s'y installent et le baron Louis et Fontanes, personnages dont l'importance aux yeux de l'Empereur n'est pas a etablir, etant respectivement charges l'un de ses finances, l'autre de la formation et de l'education de la jeunesse, avenir du pays, comme grand maitre de cette Universite, dont il faut reconnaitre qu'il est le veritable createur. L'Empire tombe, le caractere aristocratique de la rue subsiste et Ton voit revenir des noms d'Ancien Regime (a commencer par l'appellation de la rue), mais un certain appauvrissement des grandes fortunes du passe est sensible, et ces hotels, qui, au XVIIP siecle, n'etaient occupes que par des veuves retirees du monde et leurs domestiques, font desormais l'affaire de families de tout premier plan pourvues de solides revenus, comme les Daru, les Choiseul ou les Sabran. Sous la Monarchie de Juillet et le Second Empire, les militaires sont encore nombreux : il suffit a ce propos d'evoquer les noms de Hohenlohe, Oudinot, Molitor, Exelmans, Ornano, Pelissier ou Hamelin, et l'ecole du Genie maritime siege a l'entree de la rue. La haute administration est egalement presente, ne fut-ce qu'avec Duchatel lors-qu'il n'est pas ministre de l'lnterieur, ou Vatimesnil, autre grand maitre de l'Universite. On doit rappeler la construction du batiment des archives de la Cour des Comptes en 1849, dont les contemporains parlent en ces termes dans le Bulletin de la Societe centrale des architectes : " La construction a eu lieu en materiaux entierement incombustibles, les murs sont tant en pierre qu'en moellons, les voutes en maconnerie, les planchers et combles en charpente de fer et platre, suivant un systeme de hourdage creux dont l'indication est due a M. Van Cleemputte. " On sait ce qu'il en est advenu en 1871. A cote de ces officiels, intellectuels et artistes tiennent une place dont l'importance ne cesse de s'affirmer : Jules Sandeau, Nepomucene Lemercier et surtout Merimee, d'une part; Duban, Gatteaux, Ingres, Carle Vernet, d'autre. Le couronnement de cette tendance se manifeste avec eclat dans 1'installation de deux maisons d'edition aussi presti-gieuses que Gamier ou Klincksieck, a l'ombre desquelles fleurissent quantite de petits libraires et de bouquinistes dans la premiere partie de la rue. Tendance illustree par l'elaboration en 1833 par l'architecte La Cornee d'un " com-plexe " reunissant l'lnstitut, l'ecole des Mines et l'ecole de Medecine, en bordure de Seine entre les rues de Belle-chasse et de Poitiers. En parcourant actuellement la rue de Lille on peut etre surpris par son caractere disparate : a cote des vieilles maisons des xvii" et xvm" siecles, au debut de la rue surtout figurent quantite de facades Napoleon III pres du Palais-Bourbon, dues au percement de boulevard Saint-Germain et a celui de la rue de Solferino ; beaucoup d'autres sont issues de la reconstruction rendue necessaire par l'incendie de la Commune ; d'autres enfin datent de la Belle Epoque, ou sont plus recentes, ayant ete modernisees, reconstruites ou surelevees, grace a de nouvelles techniques, qui en augmentent la capacite d'accueil et de logement. Pour evoquer la rue de Lille, nous avons rencontre un certain nombre de difficultes. Compte tenu de son caractere specifique, il n'etait pas possible de se limiter, comme par le passe dans les expositions sur les rues de Grenelle et de Varenne, aux edifices les plus prestigieux qui ont fait la reputation du faubourg, la plupart d'entre eux ayant ete demolis. Nous avons done choisi, de maniere bien arbitraire et peut-etre artificielle, de montrer, dans une presentation chronologique, l'installation progressive des batiments tout au long de cette rue qui s'est construite peu a peu et de maniere anarchique a partir des extremites en laissant subsister longtemps en son milieu de grands espaces vides. Ainsi a-t-on ete amene a prendre en consideration, en depit d'une documentation iconographique quasi inexistante, un habitat de qualite moyenne et a avoir une vision moins strictement architecturale peut-etre et plus sociale, permettant de saisir dans sa mobilite et dans ses pratiques certains aspects de la societe parisienne du passe. Et il nous a paru que, prise dans son ensemble et dans sa diversite, la rue de Lille est ainsi un temoin exemplaire de l'urbanisme parisien depuis trois siecles. � (S. 13)